Suivi d’un débat avec Laetitia Mikles, documentariste et critique de films, samedi 23 novembre à 14h30
« Au départ tout semble simple… On repère vite les constances des films de Fred Wiseman : l’unité des sujets (les grandes institutions officielles ou civiles), la cohérence du style (les scènes prises sur le vif, pas d’entretien), la récurrence des obsessions (le pouvoir, la hiérarchie, la violence). En quelques films, on pense avoir cerné l’œuvre foisonnante. On s’autoriserait presque à étiqueter l’auteur : « peintre des institutions » ou « le réalisateur sociologue ». Fred Wiseman s’amuse avec ce costume de filmeur politique qu’on le force à endosser. Mais ne vous y trompez pas. Wiseman est avant tout un littéraire… En associant des sujets sociaux à des réflexions existentielles à priori antithétiques, il unit ce que la logique tend à opposer. Il nous prend en aparté et nous chuchote à l’oreille qu’il a entrevu une autre réalité. Ambiguë, complexe et paradoxale. Et nous propose le voyage. »
Interdit par la censure américaine de 1967 à 1991, le premier film de Frederick Wiseman montre sans détours l’effroyable quotidien des détenus de l’hôpital psychiatrique de Bridgewater, dans le Massachusetts. La caméra se fond au milieu de cette jungle isolée du reste de la société, accompagnant au plus près la dérive de ces prisonniers « fous », écrasés par un système pénitentiaire d’un autre âge.
Suivi d’un débat avec Laetitia Mikles, documentariste et critique de films, samedi 23 novembre à 14h30
Le système scolaire n’a pas pour seul objectif de transmettre un savoir, mais également un ensemble de valeurs, d’une génération à une autre. High School nous montre comment ce conditionnement social opère dans une école urbaine pour classes moyennes de Philadelphie, à direction et à majorité blanche. En 1968, les conventions encore rigides de l’éducation ne sont plus toujours acceptées par une jeunesse en pleine émancipation.
En présence de Frederick Wiseman (séance scolaire vendredi 29 novembre à 14h - COMPLET)
En 1970, pendant la guerre du Vietnam, les classes du 16e bataillon US à Fort Knox dans le Kentucky, où les jeunes recrues sont transformées en soldats dévoués à leur patrie. Le film dont Stanley Kubrick s’est inspiré pour la première partie de Full Metal Jacket.
La vie dans un monastère bénédictin dans le Michigan…
« Toutes leurs prières et toutes leurs conversations ont trait à la survie de la communauté, à l’organisation de celle-ci, aux résolutions des querelles entre les membres, à la répartition des pouvoirs, et ce sont là les questions qui se posent à toutes les communautés. C’est un film sur la difficulté de savoir ce qui constitue une communauté, même quand elle n’est composée que de 20 membres, comme ici. »
Dans les locaux du tribunal pour mineurs de Memphis, Tennessee, Wiseman filme le quotidien de la justice américaine. L’équipe du juge Turner y travaille avec compétence et dévouement sur des dossiers difficiles, parfois tragiques. Parents irresponsables, familles monoparentales dépassées, vols, violences domestiques, agressions sexuelles réelles ou supposées, agressions à main armée, etc.
Au centre de recherche zoologique sur les primates de Yerkes à Atlanta, les scientifiques observent les singes. Wiseman observe les scientifiques. Description du comportement sexuel et psychomoteur des animaux, expériences sur leurs réactions en situation d’apesanteur et autres opérations chirurgicales sont passées en revue.
« En un sens, Primate, c’est High School car c’est de la même discipline qu’il s’agit, celle du contrôle du comportement sexuel et de l’agressivité. »
Au sein de l’agence Zoli à New York, les mannequins hommes et femmes travaillent sur des publicités, des spectacles de mode et des couvertures de magazines. Wiseman observe l’asservissement des mannequins aux agents qui les vendent, aux créateurs qui les instrumentent, et décrit les processus de standardisation de la beauté…
The Store est le premier documentaire en couleurs tourné par Wiseman. Nous voici à Dallas, Texas, dans le grand magasin Neiman-Marcus, une institution du commerce de luxe, où le cinéaste promène sa caméra et nous montre les rites, les artifices, les mises en scène ; tout un décorum au service d’un mot d’ordre : vendre. Derrière l’ambiance feutrée du magasin, nous découvrons vite un « univers impitoyable ».
En présence de Frederick Wiseman vendredi 29 novembre à 19h30
Ce film documente la diversité des usages que font les gens de Central Park, l’un des sites les plus emblématiques de New York : marcher, courir, faire du bateau, du skate, de la musique, du théâtre, des pique niques, des spectacles. On y découvre aussi la complexité du travail du service des parcs et jardins de la ville, pour maintenir l’ordre, la propreté et le garder ouvert et accessible au public.
« Après Primate, Wiseman revient sur les rapports de l’homme et de l’animal. Tourné à Miami, ce film est devenu un document : quelques semaines après le tournage, un cyclone a balayé la Floride et très fortement endommagé le zoo. Primate avait choqué. Zoo peut rassurer. Ici, les animaux sont élevés, entretenus, soignés avec attention et compétence… pour le bon plaisir des humains. »
Regard sur un grand ensemble de logements sociaux, Ida B. Wells à Chicago, où une population marginalisée vit dans une situation d’extrême pauvreté.
Pendant les fêtes d’Halloween, le portrait d’une petite ville côtière de l’État du Maine, en Nouvelle-Angleterre. Wiseman y décrit la vie de ses habitants et de ses institutions, passant de l’école à l’usine de sardines, d’un conseil municipal à un cours à l’école de musique, ou encore à une soirée au cinéma de la ville. Un film-somme, rythmé par les beaux paysages de l’automne, où le cinéaste montre une Amérique au bord de l’épuisement…
Wiseman a installé sa caméra durant douze semaines au cœur de l’Opéra de Paris, filmant les répétitions et les spectacles de sept ballets, ainsi que le travail des administrateurs, chorégraphes, danseurs, musiciens, costumiers et techniciens de plateau…
« Le réalisateur pose (…) le regard d’un amoureux silencieux. Ce film est le plus pictural et sans doute le plus douloureusement intime de toute son oeuvre. »
Austin, Texas. Richard Lord, ancien boxeur professionnel, a fondé son club de boxe, Lord’s Gym, il y a 16 ans. Des personnes d’âge, d’origine et de classe sociale différentes s’y entraînent : hommes, femmes, enfants, médecins, avocats, juges, hommes et femmes d’affaires, immigrants, boxeurs professionnels ou aspirants professionnels s’y côtoient. Le gymnase devient une illustration du « melting-pot » où les gens s’entraînent, se parlent, se rencontrent…
La vie sur le campus californien de Berkeley, de réunions d’élèves en réunions de profs, de séminaires en cours, de revendications en manifestations : Frederick Wiseman prend son temps pour décliner toutes les formes possibles d’échanges d’idées, et fait de la parole un torrent démocratique qui grossit et emporte tout.
En avant-première dimanche 1er décembre à 14h (séance unique, présentée par Maurice Darmon, auteur du livre Frederick Wiseman - chroniques américaines, 2013)